L'Egypte bâtit une nouvelle pyramide

Publié le par Théti-Chéri

 Nouveau Musée du Caire La maquette du projet du Grand Musée du Caire retenu. Signé de l'architecte irlandais d'origine chinoise, Peng Shifu, il sera construit dans un site unique face aux pyramides de Gizeh. (Cliquez sur l'image pour l'agrandir !)

Pharaonique, ce projet. Parlant de l'Egypte, le jeu de mots est facile. Et pourtant, le Grand Musée voulu par les autorités égyptiennes cumule les superlatifs. Il sera le plus grand musée du monde, abritera parmi les plus belles et les plus anciennes antiquités de l'histoire de l'humanité, sera pourvu du plus grand et du plus moderne centre de conservation archéologique jamais conçu. Le tout situé dans un site unique, face à la seule survivante des sept merveilles du monde : les pyramides de Gizeh. Si ce musée tient ses promesses, l'objectif est aussi de pulvériser tous les records du nombre de visiteurs : 8 millions de touristes par an.

Cinquante hectares, plus de 100 000 pièces qu'il faudra acheminer des quatre coins de l'Egypte, dont un temple entier et le fameux trésor de Toutankhamon, un équipement ultramoderne, des jardins, des librairies, des magasins, des restaurants de luxe... Face à tant d'ambitions, il est difficile d'imaginer, en observant les quelques grues qui s'activent actuellement sur le chantier, que le Grand Musée ouvrira ses portes à la date prévue de juillet 2011.

Attablé devant des graphiques géants représentant les différentes phases de la conception, de la construction et de la finition du musée, Mohamed Ghoneim, responsable exécutif du projet, assure avec satisfaction que "le plus dur est passé". Sur les 550 millions de dollars (380 millions d'euros) de coût estimé, la Japan Bank for International Cooperation (JBIC) a accepté, en juin 2006, de financer 300 millions de dollars, sous forme de prêt à taux préférentiel remboursable sur trente ans. "On ne leur a pas couru après, précise M. Ghoneim, c'est eux qui sont venus nous chercher. Ils ont mis deux ans à étudier notre dossier. Résultat : le plus gros prêt du Japon jamais alloué à un pays du Proche-Orient !"

Le Conseil suprême des antiquités égyptien se charge de payer 100 millions de dollars. Quant aux 150 millions restants, c'est Nora Ebeid, directrice des ressources financières, qui s'en charge en démarchant sans relâche les banques, les institutions et tous les riches donateurs potentiels de la planète. "Les sceptiques sont des rabat-joie. Mais ils feront moins les malins quand le musée ouvrira ses portes, conclut M. Ghoneim. Et vous verrez qu'il les ouvrira à l'heure."

Des sceptiques, il y en a eu beaucoup. Depuis l'annonce du financement japonais, il en reste encore quelques-uns pour souligner les lourdeurs bureaucratiques, les querelles d'investisseurs et, surtout, les difficultés techniques qui ne manqueront pas, selon eux, d'entraver la bonne marche du projet.

Il en a fallu, du temps, avant que le président égyptien, Hosni Moubarak, ne vienne poser la première pierre, le 4 février 2002. Avant même sa construction qui ne débutera, selon les prévisions, qu'en avril 2008, le musée possède déjà une histoire. C'est le ministre de la culture, Farouk Hosni, qui en aurait eu l'idée, il y a plus de quinze ans, lors d'un voyage à Paris. Les plus hautes sphères de l'Etat en furent, dit-on, "immédiatement enchantées". En 1992, un décret présidentiel vint officialiser le projet. En 1999, des experts italiens furent chargés de réaliser une étude de faisabilité, suivie, trois ans plus tard, d'un grand concours d'architectes organisé sous les auspices de l'Unesco.

Relevant le défi d'illustrer le thème choisi - "Un portail sur le passé, un pont vers l'avenir : un emblème pour l'éternité" -, 1 557 propositions conceptuelles, émanant de 83 pays, furent déposées. Les membres du jury eurent le choix entre des bâtiments plus spectaculaires les uns que les autres, oscillant entre un style futuriste évoquant les lignes d'un vaisseau spatial et celui, beaucoup plus convenu, vu le contexte, d'une quatrième pyramide. Le premier prix, assorti d'une prime de 250 000 dollars, fut remis le 8 juin 2003 par la première dame d'Egypte, Suzanne Moubarak, à Peng Shifu, un architecte irlandais de 37 ans, d'origine chinoise, né à New York.

Le point fort de son projet réside dans la façade "lumineuse" du musée : un mur de 800 mètres de long et de 40 mètres de haut, tout en albâtre, une roche de couleur chaude, légèrement translucide et typique de l'artisanat du Sud égyptien. Gouvernement, architectes, archéologues et muséologues avaient fini par se mettre d'accord.

Les angoisses de Yasser Mansour, coordinateur du comité technique pour le musée et professeur d'architecture à l'université d'Aïn Chams, ont alors commencé. "Cette façade d'albâtre..., soupire-t-il. Le climat désertique du plateau de Gizeh n'est pas clément, et l'albâtre est très beau, mais fragile. Les mines égyptiennes ne sont suffisantes ni en qualité ni en quantité. Nous sommes allés prospecter en Espagne, en Turquie, en Iran, en Italie pour ramener des échantillons que nous avons ensuite soumis à des tests de résistance à l'érosion. C'est un véritable casse-tête scientifique."

A côté des problèmes esthétiques, l'aspect sécuritaire est un impératif dans ce pays frappé à plusieurs reprises par des attentats dans des lieux touristiques. "La sécurité d'Etat nous a imposé une distance d'au moins 80 mètres entre l'entrée principale et la route, pour éviter des attentats du type voiture piégée, raconte M. Mansour. Pour le centre de conservation archéologique, c'est une autre histoire. Nous élaborions les plans en 2003, au moment où les bombardements aériens américains s'abattaient sur l'Irak et où le Musée de Bagdad subissait un pillage en règle. Nous nous sommes posé la question : "Et si une chose pareille nous arrivait, en Egypte ?" Nous avons consulté des spécialistes britanniques en sécurité militaire pour assurer la protection des touristes comme celle des antiquités. Le centre de conservation a été construit comme un abri antibombes souterrain." "En résumé, le musée sera aussi grand qu'un aéroport et conçu pour qu'aucun avion ne puisse s'écraser dessus", conclut M. Mansour.

Le plus grand défi réside ailleurs. Il débutera au moment de rapatrier les 100 000 pièces d'exposition. Il faudra emprunter les mauvaises routes d'Egypte, et les ramener intactes. L'opération a été planifiée en 54 étapes, sur trois ans, à partir de la fin de 2007, pour seulement la moitié des objets.

"Ce sera le plus grand transfert d'antiquités jamais effectué dans toute l'histoire de l'humanité", articule Yasser Mansour. Une perspective qui lui cause des sueurs froides. Certaines pièces sont extrêmement fragiles, en bois très ancien, en feuilles d'or... Toutes sont précieuses. "Nous ne voulons pas le faire seuls. L'Egypte manque d'expérience. En réalité, nous allons vraiment avoir besoin des meilleurs cerveaux du monde."

Il pointe du doigt la statue de Ramsès II, encerclée d'échafaudages, que l'on aperçoit par la fenêtre de son bureau. Ce colosse de pierre, longtemps emprisonné au milieu d'un entrelacs de routes et d'échangeurs en face de la gare centrale du Caire, a été sauvé de la pollution et des vibrations provoquées par le métro, pour trôner, le jour venu, au beau milieu du hall principal du Grand Musée. "Son transfert était prévu pour décembre 2004, il a été effectué fin août 2006. Cela nous a coûté presque 1 million de dollars. Le moindre choc était susceptible de le réduire en morceaux, explique le professeur. Un comité d'experts a planché une année entière pour trouver un moyen de le déplacer. Il n'y avait que 5 kilomètres à parcourir. Mais vous connaissez l'état des routes en Egypte : les embouteillages, les dos-d'âne, les nids-de-poule... Nous avons décidé de commencer le transport à minuit, quand Le Caire commence à se vider. Peine perdue, une foule a suivi le convoi, à pied, durant les neuf heures qu'a duré le trajet, et les gens pleuraient comme s'ils accompagnaient leur père au cimetière !", raconte-t-il.

Quelles solutions seront trouvées pour démonter et remonter des vestiges vieux de plusieurs milliers d'années, pour assurer la sécurité des parures de Toutankhamon ou encore pour déplacer le Bateau solaire, long de 40 m et tout en bois ? "Quand j'y pense, répond M. Mansour, cela m'empêche de dormir." La saga du Grand Musée d'Egypte ne fait que commencer.

Cécile Hennion de Le Monde.fr

Publié dans Papyrus Misr

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K
bonjour princessenous avons alors en commun l'amour de cette sublime civilisation qu'est celle de l EGYPTE E KHA PTHA LE PAYS DU KHA DE PTHAje te conseille alors ce livre "mitterrand le grand initié" par nicolas bonnal editions albin michel .cet ouvrage démontre que mitterrand etait la reincarnation du pharaon sethi 1er et qu'il le savait parfaitementvoir alors les photos de la momie du sethi 1er sur ce site http://sethy1.free.frmerci de faire connaitre ces informations à ceux qui en sont dignes amitiés sincères jean
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N
Je fais partie de ceux qui regretteront le charme désuet du musée de midan Tahrir, qui restera toujours dans mon coeur le vrai musée du Caire... Je trouve plusieurs défauts à ce projet : qu'il soit commandé à un architecte étranger et non à un Egyptien (on a la même manie en France, les commandes d'Etat ne servent plus à soutenir la création du pays) ; sa localisation ; etc. <br /> Je sais, je suis un vieux râleur... ; )<br /> Bussa kebir<br /> Nefred
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L
Très intéressant cet article avec toutes ces problématiques muséographiques.Dans le même ordre d'idée le projet de "Louvre Abou Dhabi" sera aussi "Pharaonique".....
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Bonjour ! cela risque d'être magnifique ! (enfin ce n'est pas un risque ! lol)<br /> bonne journée
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Belle journée :0059: et bises de la mer rouge! ! ! ! :0125:    @nne marie  
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